A une question sur les arguèdènes de Jean-Marie Piérard, trombone et professeur bénévole de solfège à l'harmonie de Fraire, voici une réponse épistolaire de M. Franz Jacquet, ancien tuba-basse solo à la Musique royale des Guides et à l'orchestre de la RTBF et ancien professeur de cuivres à l'académie de Ransart.

 
Jean-Marie,
 
Il n'y a pas longtemps je parlais des leçons de solfège et d'instrument dispensées au sein de l'harmonie. Aujourd'hui, à ta demande, voici un mot sur les "arguedennes".
Je dirai que c'est un air, souvent de bravoure, que l'on a glané çà et là et que l'on joue par cœur avec un accompagnement assuré par ceux "qui ont de la feuille". Il y en a qui sont très doués dans ce domaine et d'autres moins. Ce n'est pas une question d'intelligence. Ce serait un peu comme pour la danse. Imaginons une scène au bal : Tu sais danser ? Non ! Et toi ? Moi cela ne m'a jamais rien dit. Cependant voici une farandole ; tout à coup Ginette se sent soulevée par Justin son mari qui, jusque-là avait fait le mort. Que s'est-il passé ?
Va savoir, dirait Bébel.
Je vais te dire. Lorsque je suis entré dans les orchestres professionnels classiques, J'ai été étonné de ne pas rencontrer chez ces monstres de talent du quatuor un musicien prêt à se joindre à la bande de l'arrière (bois et cuivres) qui, en guise de détente après concert, entamait des "arguedennes" n'ayant rien à voir avec la Rue de la Régence à Bruxelles (note : endroit où se trouve le conservatoire royal).
Parfois tout de même, un violoniste venu d'autre part, se souvenant avec émotion et nostalgie de son folklore natal, lançait une czardas. Nous l'écoutions avec émerveillement, nous ressentions la beauté de son jeu et son message d'amour envers les siens et sans doute envers nous.
Voilà, Jean-Marie. Pour ce qui me concerne, je me souviens de mon père, musicien amateur de talent. Chaque jour de notre enfance il est venu le soir s'installer devant notre lit pour nous raconter en musique son parcours "d'arguedennes en arguedennes". Ce fut un très beau cadeau. Crois-moi : nous sommes des privilégiés.
 
Franz.