Fraire, Sainte-Cécile, le 20 novembre 2011.
Discours de Jean-Marie Piérard destiné à Franz Jacquet pour fêter plus de 65 ans de musique.

Nous avons l’honneur, Andrée et moi, de représenter la Fédération musicale royale de Namur à la demande du comité de l’harmonie royale « l’Union » de Fraire.

Franz,
Au vu de renseignements recueillis çà et là, Alphonse, ton papa, vous a bercés tes frères et toi au son des arguèdènes au pied du lit pour vous endormir ! Heureuse époque !
De ta première vocation de plafonneur, il reste un plâtrage minutieux du beurre sur ta tartine !
Parallèlement tu entames ton apprentissage musical au sein des sociétés de Walcourt et Yves-Gomezée que ton papa dirige et où il enseigne les rudiments musicaux aux jeunes débutants.
Progressivement ton parrain et d’autres sociétaires te poussent vers une carrière militaire que tu débutes comme clairon, puis trompette, dans l’Orchestre du Premier Bataillon EM d’Ossendorf dirigé par Karl Torf.
Tu y rencontres Peter Devleeshouwer qui t’apprend les bases musicales élémentaires et les rudiments d’harmonie. Il t’incite aussi à présenter des examens dans d’autres orchestres pour pouvoir rentrer travailler en Belgique. Tu apprends ainsi le bombardon en trois semaines sur une vieille riquette prêtée par un ami, des examens de basse se profilant à l’horizon. Tu sors premier de l’épreuve de sélection pour l’orchestre militaire de Liège.
Tu remplaces sporadiquement le bassiste dans plusieurs orchestres belges réputés, tels l’orchestre de Francis Bay, l’Omroep Orkest où tu côtoies de nombreuses pointures, dont le vibraphoniste Sadi, l’orchestre de Jo Carlier qui accompagne des artistes comme Gloria Lasso, Nana Mouskouri et bien d’autres et où tu rencontres Roland Cardon, au saxo alto, qui t’encourage à passer les tests de sélection pour la basse à la Musique des Guides.
Ton classement en première place t’attribue le poste de Basse solo au sein de l’Orchestre royal d’harmonie de la Musique des Guides, où tu feras référence pendant 17 ans. Tu es le seul musicien belge à avoir accompagné à la basse l’orchestre russe du Bolchoï !
La vie civile te tente. Tu présentes et réussis l’examen d’entrée à l’Orchestre de la RTB, où tu retrouves des Luc Capouillez, des Franz Masson et bien d’autres, jusqu’à ta retraite. Tu contribues, en collaboration avec Yves Treuttens, à l’adaptation de pistons tirés plutôt que poussés (pistons à anneaux).
Tu enseignes la basse en individuel à des Sébastien Masso, qui deviendront des solistes internationaux, ainsi que dans des académies : Bruxelles et Ransart, où tu auras à supporter comme élève un certain Jean-Marie Piérard !
Cet exposé pourrait passer pour un hommage post-mortem. Heureusement il n’en est rien ! Il était nécessaire cependant pour montrer la progression exceptionnelle d’un gamin de fanfare vers des sommets vertigineux et la reconnaissance de ses pairs.
Le simple fait de dire que je joue régulièrement avec Franz inspire l’admiration. Merci Franz !
Je voudrais maintenant vous parler d’un impact révolutionnaire sur notre société.
A chaque concert, vous lisez distraitement, au dos de votre programme, les moments forts de notre société. Vous voyez 1977 : Naissance d’un quintette de cuivres sous la direction de Franz Jacquet. Etape parmi d’autres pour la fanfare de l’époque. En fait, à l’issue d’une Saint-Laurent bien arrosée à Yves-Gomezée, en quittant la salle, Franz nous stoppe : Richard, Arthur, Amour et moi. Il éloigne d’autres musiciens qui voulaient nous rejoindre. Dans la nuit, il nous positionne en cercle, impose à chacun une note d’accord : trois modulations. Il donne le top départ et entame toutes les variations possibles du Carnaval de Venise ! Reprises piano, forte, mezzo forte, crescendo, decrescendo, tous rythmes ! Le quintette était né.
Au fil des répétitions, il nous a fait entrer littéralement dans la Musique ! Terminées les compétitions de virtuosité. Nouveaux objectifs : écouter les autres, repérer la note sensible, la dominante, les mettre en valeur, respecter les temps forts, faibles, respirer ensemble, vivre la mélodie et, comme une patrouille acrobatique, évoluer ensemble. Croyez-moi : ça laisse des traces !
A la suite du désistement de Richard, Philippe vient nous rejoindre. Franz a tôt fait de lui ouvrir la voie du professionnalisme.
Il nous a aussi permis de rencontrer des musiciens merveilleux.
Avec son aide, j’ai pu inviter à Fraire le Quintette de cuivres André Philippe et le Quatuor de trombones de Bruxelles, tout cela sans aide financière de la Maison de la Culture de Namur ni de la fanfare qui n’était pas prête à l’époque (porte-à-porte Fernande, Géraldine, Laurent et moi pour recueillir les fonds nécessaires).
Toute cette culture nouvelle nous a amenés au revirement spectaculaire de notre société.

Tout cela, Franz, je pense sincèrement que nous te le devons. Et je pense que tu devrais encore prendre une place plus importante au sein de notre société ; tu peux encore conseiller de nombreux musiciens qui auront la sagesse de t’écouter.
Cela me fait tellement plaisir d’entendre de grands musiciens que je côtoie et qui connaissent notre harmonie me dire : « Tiens, Untel ? il est de chez vous ? — Bien sûr ! — Eh bien, chapeau ! il est entré dans la musique ! »

Franz, Andrée et moi, ainsi que l’ensemble du Comité et les musiciens de notre Harmonie, avons la joie de te remettre la Plaquette d’Hommage de la Fédération musicale royale de Namur attribuée aux personnalités recommandées par les sociétés. Pour nous elle est attribuée à un grand Monsieur, un grand Musicien. Un immense merci de nous tous !

Jean-Marie Piérard - Administrateur FMN
Andrée Tasseroul - Secrétaire FMN.